Treize ans après les années dévastatrices de la crise de 2007-2008, l’ACPR apparaît comme l’un des leviers choisis par l’État français pour éviter la réapparition d’une crise financière et des signes de récession. Si son rôle est aujourd’hui devenu capital dans notre économie, nous sommes beaucoup à ignorer la véritable fonction de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Régulation.

 

Une institution récente mais indiscutablement puissante

 

Fondée au lendemain de la crise des subprimes, l’ACPR est une autorité administrative indépendante adossée à la Banque de France. Possédant sa propre autonomie financière, elle voit le jour grâce à la fusion entre deux autorités de contrôle des secteurs de la banque et de l’assurance : la Commission Bancaire et l’Autorité de Contrôle des Assurances et des Mutuelles (ACAM) et de deux autorités d’agrément : le Comité des Établissements de Crédit (CEA) et le Comité des Établissements de Crédit et des Entreprises d’Investissement (CECEI).

Depuis 2010, l’influence de l’ACPR n’a cessé de croître, tout particulièrement après la signature de la loi de régulation et de séparation des activités signée en août 2013, concernant la régulation et la stricte délimitation des activités bancaires.

Bien qu’elle soit une institution récente, le rôle de l’ACPR est indiscutablement puissant en plus d’être double :

 

  • D’un côté, elle délivre une certification bancaire appelée l’agrément d’établissement ACPR, qui est indispensable aux institutions financières pour exercer leurs activités commerciales. Ces agréments permettent de prévenir des fraudes financièreset des financements d’activités illégaux.Signature d'un contrat

 

  • D’un autre côté, l’ACPR contrôle l’application des règles de solvabilité établies par le comité de Bâle, instance en charge de la réglementation bancaire internationale ayant pour but de renforcer la solidité du système financier mondial.

 

 

Quelles sont les principales missions de l’ACPR ?

 

Le rôle de l’ACPR est vaste et touche à de nombreux domaines d’intervention. Que cela soit des missions de protection client ou bien de renforcement de la stabilité du secteur financier, les missions de l’ACPR affectent aussi bien les plus petites sociétés d’assurance ou de courtage que les plus grosses banques nationales. Malgré cette diversité d’action et de champ d’intervention, quatre missions peuvent être clairement distinguées.

  • Renforcer la stabilité du secteur bancaire et financier : en effet, l’instabilité bancaire peut avoir des répercussions négatives sur l’économie réelle. Il faut dès lors réussir à maintenir une certaine confiance dans ce système financier en veillant continuellement à sa solvabilité. Par exemple, une banque avec un ratio de solvabilité fort va pouvoir faire face aux nombreux risques potentiels liés à ses activités, comme un non-remboursement de crédit. De cette manière, plus les agents ont confiance dans le système bancaire dans sa globalité, plus ils vont participer à ce système et moins il risquera de s’effondrer.

 

  • Renforcer la stabilité financière des institutions françaises sur la scène européenne et internationale : l’ACPR va permettre d’accroître la légitimité de la régulation bancaire en France, notamment auprès d’instances européennes ou internationales comme l’Autorité Bancaire Européenne (ABE) ou encore auprès du Comité de Bâle.

 

  • Protéger la clientèle en luttant contre l’asymétrie d’information jugée comme étant la cause première de l’instabilité du secteur financier. En effet, l’asymétrie d’information accentuerait l’aléa moral en incitant les emprunteurs à se livrer à des activités augmentant les probabilités de défaillance et favoriserait ainsi la contagion des paniques bancaires comme on a pu le voir en 2007-2008. Bien que la réalité des pratiques soit difficile à résumer en quelques lignes, l’ACPR a instauré depuis 2010 un dispositif de recommandation des bonnes pratiques à adopter pour limiter les risques des institutions financières et des clients. En cas de non-respect de ce dispositif, l’ACPR se réserve le droit d’instaurer toute une série de sanctions financières mais aussi contraignantes.

 

  • Apporter une vision globale du système financier (supervision prudentielle), en essayant de comprendre de quelle manière le secteur financier peut être affecté par différents mécanismes et facteurs et surtout comment y lutter et résoudre ses problèmes avant d’arriver au stade de crise financière. L’ACPR, se voulant toujours plus précise et transparente, a développé ses capacités de recherche de manière plus fréquente et rigoureuse, en analysant par exemple l’ensemble des risques présents dans chaque secteur.

 

De cette manière, le rôle de l’ACPR est complexe et pluriel car il oscille sur des champs d’intervention aussi vastes que différents, tout en ayant la volonté de promouvoir une bonne santé des institutions financières en même temps que de devoir protéger ses clients.

LA4Lire aussi : Une nouvelle crise financière pour demain ?

 

Une institution de contrôle ramifiée

Afin d’assurer sa pluridisciplinarité et de comprendre au mieux les spécificités de chaque domaine d’intervention dont elle a la surveillance, l’ACPR est organisée en quatre structures distinctes :

 

  • Le collège de supervision, composé d’un cortège de 19 membres et présidé par le gouverneur de la Banque de France (depuis 2015, François Villeroy de Galhau), son rôle est d’établir les orientations générales de l’institution.

 

  • La commission des sanctions, présidée elle, par un conseiller d’État (Alain Ménéménis) et de 5 autres membres, est en charge de poursuivre les institutions financières qui n’auraient pas respecté les règles préétablies. Il peut s’agir aussi bien d’un simple avertissement que d’une sanction pécuniaire ou encore d’une interdiction temporaire d’exercice.

 

  • Les commissions consultatives, au nombre de quatre, ont été créé dans un but d’assister et rendre un avis concret et poussé au collège de supervision sur des domaines de compétences spécifiques comme le climat et la finance durable, les pratiques commerciales, la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ou bien encore pour traiter des affaires prudentielles.

 

  • Le comité scientifique, qui lui est composé pour la majorité d’experts, son rôle est de porter attention aux innovations bancaires qui pourraient influencer le fonctionnement des institutions financières. C’est un comité qui a avant tout un rôle d’anticipation et d’avertissement sur les évènements qui pourraient affecter la stabilité des institutions financières dans le futur.

 

Tour de contrôle sur la plage

Quelles sont les règles auxquelles doivent se soumettre les banques ?

La régulation bancaire est assurée par le Comité de Bâle, instance fondée en 1974 et rassemblant au total 27 pays. En effet, ratifiés à partir de 2015 et mis en place depuis le 1er janvier 2019, les accords de Bâle 3 ont été négocié au sein de la Banque des Règlements Internationaux. Ils visent d’abord et avant tout à lutter de manière efficace contre le risque d’illiquidité des banques. Ce sont donc des accords inédits et très différents des deux précédemment signés (accords de Bâle 1 : 1998 et accords de Bâle 2 : 2006) car ils instaurent une réglementation complète au sein du secteur financier.

 

L’étape marquante des accords de Bâle 3 repose sur la création :

  • d’un nouveau ratio d’insolvabilité : les fonds propres des banques doivent représenter au moins 3% du total de l’actif bancaire.
  • d’un nouveau ratio d’illiquidité : les engagements des banques à court terme en titres sécurisés devront représenter 100% des dépôts.
  • d’une augmentation de 2% du ratio McDonough : les fonds propres des banques doivent représenter au moins 10% des créances détenues pondérées du risque crédit.

La tendance est donc à l’équilibrage des bilans et se caractérise par la volonté continuelle de donner toujours plus de crédibilité et d’efficacité à la supervision prudentielle au sein du secteur financier.

 

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Quelles sanctions prévoit l’ACPR en cas de non-respect de ces règles ?

 

Le pouvoir disciplinaire de l’ACPR est organisé entre le collège de supervision et la commission des sanctions, les deux institutions étant totalement indépendantes.

 

Dans un souci de respect des règles, les institutions financières peuvent être sanctionnées en cas de manquement à leur devoir de conseil, de gouvernance, en cas de modification d’un contrat d’assurance, de non-respect d’une mise en demeure ou encore de leurs inactions dans la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.

 

Les motifs sont nombreux et les sanctions peuvent être très sévères. En effet, en cas de non-respect avéré des règles préétablies, les sanctions peuvent aller du simple avertissement jusqu’à une radiation totale. C’est ainsi qu’en février 2020, le courtier en assurance Viva Conseil s’est vu pénalisé d’un blâme ainsi que de l’interdiction de commercialiser pendant deux mois des contrats d’assurances en France et à l’étranger pour insuffisance et inexactitude des informations communiquées et non-respect de son devoir de conseil.

 

Ils existent aussi et en même temps des sanctions pécuniaires pouvant osciller entre 80.000 et 10 millions d’euros. En effet, en mars 2020, Generali Vie, filiale française de l’assureur italien, a écopé d’une sanction de 10 millions d’euros ainsi que d’un blâme pour une multitude de raisons dont le non-respect de certaines règles comptables propre au Plan d’Épargne Retraite Populaire (PERP).

 

En 2017, l’ACPR aurait amassé plus de 25,86 millions d’euros. L’ensemble des sanctions décidées par l’ACPR sont ensuite inscrites dans le recueil de jurisprudence pour une durée préétablie lors du jugement de la sanction. Ce recueil lui permet ainsi d’avoir un historique des institutions financières qui ont déjà été pénalisées.

LA4Lire aussi : Les conséquences de Bâle III sur le risque systémique

 

Ne pas confondre les missions de l’ACPR et de l’AMF

 

A la différence de l’ACPR qui délivre son propre agrément, l’AMF veille à la protection de l’épargne investie dans les instruments financiers, à la bonne circulation de l’information du côté des investisseurs et au fonctionnement optimal des marchés d’instruments financiers.

Composé d’un collège (actuellement présidé par Robert Ophèle depuis août 2017) et d’une commission des sanctions indépendantes, l’Autorité des Marchés Financiers régule donc des sociétés d’investissement, des sociétés de gestion de portefeuilles et des marchés financiers tandis que l’ACPR sera davantage ciblée sur les banques et établissements de crédit, les établissements de paiement ou encore les entreprises d’investissement.

Feu vert pour piétons

 

Malgré toutes ces disparités, ces deux institutions possèdent un objectif commun : celui de la protection du consommateur.

 

 

 

 

La création d’un point d’entrée commun

 

En avril 2010, une convention a été signé afin d’instaurer un mécanisme de coordination entre l’Autorité des Marchés Financiers, l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Régulation et la Banque de France. L’Assurance Banque Épargne Info Service (ABEIS) est née. Cette étape marque le tout premier rapprochement entre deux instances qui n’avaient auparavant jamais instauré d’actions collectives d’une telle envergure.

 

Par l’intermédiaire d’un site mais aussi d’une plateforme téléphonique dédiée, le rôle de ce service est ainsi d’informer et d’orienter le public concernant des questions d’assurance, de banque, de bourse et des produits d’épargne.

 

Les informations sont éditées de manière ludique, notamment par l’intermédiaire de vidéos et de questions réponses dans lesquelles chacun, même les moins initiés, peuvent trouver les explications qu’ils cherchent.

 

Si le bilan de cette coordination a été jugé plutôt mitigé, il a cependant suscité une véritable dynamique auprès des personnes intéressées. Dans son rapport, la Cour des Comptes a affirmé vouloir continuer cette coopération mutuelle et pourquoi pas l’étendre dans le futur.

 

Augustin Berger, étudiant à NEOMA Business School et contributeur du blog AlumnEye