Invité au Canal Football Club en septembre 2019, cela est l’occasion de retracer le parcours de celui qui s’est lancé un nouveau challenge depuis deux ans : faire croître le LOSC et le faire arriver dans le top 5 Europe.
Un début de carrière sur les chapeaux de roues
Diplômé de l’Université de Miami en systèmes intégrés de gestion et en gestion opérationnelle, Gérard Lopez fait ses premiers pas en tant qu’investisseur à l’âge de 22 ans dans les fonds privés spécialisés dans les technologies et les investissements immobiliers.
Il démarre ainsi dans les années 1990 en cofondant Mangrove Capital Partner au Luxembourg, société de capital-risque ayant pour objectif d’investir dans des sociétés européennes développant des solutions logicielles innovantes pour les professionnels et les particuliers. Quelques années plus tard, forte d’une expertise avant-gardiste démontrée par un investissement prometteur dans l’entreprise estonienne Skype, Mangrove Capital Partner devient l’un des trois plus gros investisseurs européens dans les technologies. Au fil du temps, le fonds impose son modèle en favorisant notamment des investissements allant jusqu’à 15 à 20 millions d’euros – en « early stage » – dans des start-ups jugées innovantes. Stratégie payante, car Skype est revendue quelques années plus tard à eBay, pour 4,1 milliards de dollars.
Suite à cela, il cofonde en 2008 avec Eric Lux, toujours au Luxembourg, Genii Groupe et préside la société Genii Capital, cabinet international en investissements et conseils financiers, qui trouve sa spécialisation dans la gestion des marques, les nouvelles technologies ou encore le sport automobile, en préparant aussi bien les introductions en bourse que les fusions et acquisitions. Suite à une restructuration en 2011, Genii Groupe aspire Genii Capital dans sa division finance et continue de veiller sur les activités commerciales respectives de Gérard Lopez et d’Eric Lux.
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Passionné de sport et notamment de sports automobiles, c’est par le biais de Genii Capital qu’il fait l’acquisition de l’écurie de Formule 1, Lotus F1 Team et en devient le propriétaire majoritaire durant presque cinq ans. En effet, c’est fin 2010 qu’avec le Group Lotus plc que Genii Capital annonce la création de l’écurie Lotus Renault GP, qui aura pour but d’allier les deux entreprises dans une valorisation d’opportunités commerciales et technologiques dans le développement d’une gamme de voitures sportives Lotus, ce qui permet également le retour du constructeur Lotus Cars et de Proton. Cette écurie court en Formule 1 jusqu’en 2015, après deux saisons exceptionnelles en 2012 et 2013 où elle termine deux fois au 4e rang mondial derrière trois écuries au succès affirmé : Red Bull, Ferrari et Mercedes, avant d’être vendue à Renault F1 Team pour un euro symbolique.
Gérard Lopez est également actif dans le domaine de l’énergie ; il est en effet le fondateur et PDG de Nekton depuis 2015, une société d’investissement et de courtage dans ce domaine, active notamment en Amérique du Sud, en Asie, en Afrique et en Europe de l’Est.
Mais c’est une toute autre ambition qu’affiche l’investisseur luxembourgeois à l’aube de 2017 en rachetant et devenant président du LOSC, le club de foot de Lille.
Sa vision et sa gestion du LOSC, ou comment accéder à la tant convoitée Ligue des Champions
Après une tentative avortée de rachat du club de l’Olympique de Marseille, Gérard Lopez met le cap sur le Nord en rachetant et devenant président du LOSC (Lille Olympique Sporting Club). Il impose rapidement sa vision entrepreneuriale des choses en déclarant que sa « stratégie consiste justement à investir fortement dans le but de recréer un cercle économique vertueux mais aussi de la croissance qui doit [nous] amener, à terme, à développer les recettes et rééquilibrer le modèle ». C’est en suivant cette stratégie et en développant un modèle économique basé sur le trading des joueurs que Gérard Lopez a su faire retrouver au LOSC ses lettres de noblesse, de là, un seul objectif, que le club joue l’Europe tous les ans.
Et comme il a pu le déclarer à la Voix du Nord, « ce sont les investissements qui amènent la Ligue des Champions » et ce n’est pas peu dire. Le Mercato de l’été 2019 aura été fructueux avec environ 37 transactions et presque 90 millions d’euros en jeu. Le LOSC s’est ainsi avéré être un bon vendeur sur le marché des transferts cet été avec une stratégie claire : transactions et croissance. Lopez s’impose et avec lui sa vision d’homme d’affaires, il gère le club comme une entreprise en plaçant et en vendant des joueurs comme des produits financiers.
Cela s’avère aujourd’hui payant, car depuis que le club est passé sous la présidence de Lopez, il ne cesse de croître et de s’améliorer, jouant aujourd’hui dans la cour des grands en faisant partie intégrante de la Champions League.
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Véritable génie des affaires, des zones d’ombres subsistent
On retient ainsi du personnage son intelligence et son aisance pour faire les bons choix au bon moment, comme la revente notable de Skype à eBay pour plus de 4 milliards de dollars alors que la start-up n’en valait qu’à peine 20 millions seulement quelques années auparavant. Cela peut paraître anodin, mais c’est pourtant assez représentatif de sa gestion globale de ses affaires, et le nouveau défi brillamment relevé du rachat du LOSC ne peut que l’attester.
Pourtant, ses premiers pas dans le monde du football restent amers et laissent toujours planer quelques doutes quant à son respect de la législation et de l’éthique. En effet, Gérard Lopez est connu pour avoir à l’époque utilisé deux de ses sociétés luxembourgeoises pour spéculer, ou faire l’acquisition de droits économiques de joueurs de football dans le but d’empocher ensuite un pourcentage non négligeable sur leur futur transfert, comme l’ont révélé Médiacité, Médiapart et France 3 Hauts- de-France. La tierce propriété ou TPO (Third Party Ownership) est maintenant interdite depuis 2015 par les règlements de la FIFA, car considérée comme de l’esclavage moderne.
Ceci n’étant que la partie émergée de l’iceberg, car son acquisition du club de Lille a également été le sujet d’une enquête, il aurait en effet usé d’un montage financier complexe impliquant un certain nombre de sociétés installées aux quatre coins du monde. Pas moins de trois autres entités auraient ainsi pris parti dans un montage offshore pour arriver jusqu’au rachat du LOSC.
Cependant, Gérard Lopez reste perçu comme un fonceur, sachant s’entourer et n’ayant pas peur de relever de nouveaux défis, avec toujours la même soif d’entreprendre, peut-être est-ce cela, le secret de la réussite. Il ne s’arrête pourtant pas là, Gérard Lopez entend en effet créer la surprise en Ligue des Champions pour cette nouvelle saison, comme il a su la créer en Ligue 1 l’année précédente, ceci n’est donc pas la finalité du LOSC, mais une étape de plus franchie.
Charlotte Ledru, contributrice du blog AlumnEye
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